« Les efforts dont l’Europe est le leader, restent très insuffisants »
Il faut donner un prix à la tonne de CO2
« La division par quatre de nos émissions dans les 40 ans qui viennent, sera trop coûteuse si elle n’est pas aussi parfaitement optimisée que possible et cet effort ne sera accepté que s’il est équitablement partagé entre les européens. Seule l’attribution d’un prix à la tonne de CO2 émise, applicable à tous, progressivement croissant et programmé peut minimiser le coût de l’effort qui nous est demandé. »
Pour illustrer le défaut d’optimisation des coûts, Michel Rocard mentionne les aides par
tonne de CO2 évitée qui sont « très hétérogènes et insuffisamment évalués ». Il s’attarde également longuement sur la filière bois qui, dit-il, est anormalement désavantagée dans l’industrie du bâtiment.
Le mécanisme des quotas ne couvre qu’une part très insuffisante des émissions de CO2
« La mécanique encore très imparfaite des quotas et du marché du carbone traite en France un tiers environ du problème du CO2 seulement. Dans un tel contexte, la proposition de la contribution climat énergie pour organiser l’effort demandé aux émetteurs de CO2, non soumis au dispositif des quotas, est une excellente initiative, en attendant que l’Europe se dote d’une politique pleinement satisfaisante. »
Michel Rocard déplore le mode de gouvernance de l’UE qui fait que la mise en place de quotas peut se faire à la majorité qualifiée, alors qu’il faut l’unanimité pour toucher à la fiscalité.
Sa conviction qu’un signal prix est efficace sur le long terme est étayée par deux exemples :
« Nous devons à la TIPP de consommer aujourd’hui 3,5 fois moins de carburants par habitant que les USA et d’avoir une industrie automobile performante quand la leur est en faillite. »
« L’écart très élevé de taxation entre l’essence et le gazole que nous connaissons en France, depuis des décennies, est la plus belle démonstration de la force d’un signal fiscal pour orienter une technologie. »
Il faut repenser profondément nos prélèvements obligatoires
Il y a des prélèvements obligatoires vertueux et d’autres qui sont pervers :
« La TIPP qui freine nos consommations de pétrole (ressource non renouvelable, importée en totalité et dont la consommation crée le changement de climat), ne représente que 3,5% de nos prélèvements obligatoires ; simultanément, la main d’œuvre qui est renouvelable, que nous n’importons pas et dont la sous utilisation coûte budgétairement très cher (sans parler de son coût social non monétarisé) sert d’assiette à 38% de nos prélèvements... »
Avant de bouleverser l’empilement de nos prélèvements obligatoires, il parait indispensable de mener une étude d’impact, mais l’exemple de la Suède nous montre que c’est possible :
« Elle a, en une seule fois, le 1er janvier 1993, changé d’assiette une masse considérable de prélèvements obligatoires représentant 6 % de son PIB ; il semble qu’elle y ait beaucoup gagné. »
Il faut se focaliser sur les transports
« Les transports sont le plus gros émetteur de CO2 (40% du total en France) et le seul encore en croissance sensible et les émissions de CO2 ne sont qu’une
des externalités liées à cette activité, à laquelle s’ajoutent les coûts d’infrastructure,
d’insécurité et les atteintes à l’environnement local. (...) Il faut cesser de subventionner la mobilité, en ne lui imputant pas tous ses coûts, pour ne pas la développer au-delà de son utilité sociale et économique réelle. »
« Compte tenu du caractère peu réversible des choix induits par la tarification des transports,
nous devrions examiner s’il n’est pas souhaitable que l’accroissement du coût du carbone soit plus rapide dans ce secteur que pour les autres émetteurs de CO2. »
« La taxation des carburants n’est que l’une des modalités d’imputation des externalités des transports, d’autres voies sont insuffisamment explorées. »
« Dans l’immédiat, il est sans doute souhaitable que la contribution climat énergie s’applique additivement (au même taux) aux taxes actuelles. »
Pour débattre : Contribution climat-énergie : quelles modalités ?