Une analyse détaillée de son rapport publié le 28 juillet 2009 révèle une certaine confusion.
D’un côté il affirme à plusieurs reprises :
« L’instauration de la CCE a pour finalité exclusive la réduction des émissions de CO2 et ne doit donc pas être perçue comme le financement de la réduction de la taxe professionnelle. »
De l’autre, il indique que l’idée n’est pas stupide, et même probablement la plus pertinente qui soit, même si elle ne recueille pas l’unanimité :
« Cependant, l’idée que la recette ainsi dégagée y concoure est admise par la plupart des parties prenantes (mais non par toutes cependant), la priorité devant être donnée, dans l’utilisation de la recette, à la compétitivité. »
Mais comme la pensée de Michel Rocard exprime des subtilités parfois difficiles à appréhender, hyperdebat a extrait de son rapport tous les passages qui évoquent la taxe professionnelle, citée à 9 reprises.
Extraits du rapport Rocard
« L’instauration de la CCE a pour finalité exclusive la réduction des émissions de CO2 et ne doit donc pas être perçue comme le financement de la réduction de la taxe professionnelle. Le caractère distorsif de celle ci est reconnu par la plupart des parties prenantes, quoique non par toutes, plusieurs d’entre elles soulignant la nécessité de disposer à cet égard d’un diagnostic plus complet sur le redéploiement fiscal à opérer à moyen terme. » (p 3)
« Dans ce cadre, deux options ont émergé : une baisse des cotisations sociales employeurs et une baisse de la taxe professionnelle.
La baisse des cotisations sociales employeurs pourrait, selon les estimations de la DGTPE et du CIRED, avoir des effets très positifs sur l’emploi. Elle soulève cependant, comme pour les ménages, une difficulté dans la mesure où les dépenses sociales que ces cotisations viennent financer sont amenées à augmenter dans les années qui viennent.
La baisse de la taxe professionnelle, en diminuant les coûts moyens de production des entreprises, constituerait une bonne "antidote" au risque de pertes de compétitivité induit par la CCE. Cette option impliquerait un traitement attentif des implications d’un tel redéploiement sur les finances publiques locales et l’organisation territoriale. » (p 51)
« L’instauration de la CCE a pour finalité exclusive la réduction des émissions de CO2. Elle ne doit pas être perçue comme le financement de la réduction de la taxe professionnelle, si on veut l’inscrire dans la durée. Cependant, l’idée que la recette ainsi dégagée y concoure est admise par la plupart des parties prenantes (mais non par toutes cependant), la priorité devant être donnée, dans l’utilisation de la recette, à la compétitivité. » (p 55)
« Du côté des entreprises, il faut arbitrer de même entre : les aides à la transition énergétique ; les allègements de cotisations sociales employeurs, ou l’affectation à la suppression de la taxe professionnelle, sachant que la fiscalité française se caractérise par son poids élevé sur le capital, qui nuit à notre attractivité. Dans ce cas, il faut signaler que cette baisse bénéficiera aux entreprises soumises à l’ETS. Le problème d’équité correspondant peut cependant être relativisé sans doute en notant que ces entreprises sont par ailleurs soumises à des contraintes de compétition internationale très forte, qui n’ont pu être traités jusqu’à présent, en l’absence de possibilité d’instaurer des mécanismes d’ajustement aux frontières communautaires. Le second dividende correspondant n’est donc pas contestable.
De manière générale, la France se caractérise par une fiscalité élevée sur le capital, qui décourage l’investissement ou la localisation des activités sur notre territoire. La taxe professionnelle constitue à cet égard une singularité pénalisante qu’il convient de démanteler. Si les travaux des ateliers et de la table ronde n’ont pu approfondir la priorité relative à accorder à ce projet, par rapport à d’autres pistes alternatives de réduction des prélèvements obligatoires sur le travail ou le capital, il ne peut être contesté qu’une telle utilisation de la recette s’inscrirait dans le cadre souhaité d’une réforme fiscale verte.
En effet, la part de la TP assise sur les immobilisations qui résultent d’un investissement productif constituait une curiosité du système français, qui taxait l’investissement et non seulement les revenus du capital. Si le capital est mobile et se joue des frontières, ce qui est le cas pour les entreprises industrielles, il en résulte que le travail qualifié supporte en fait l’intégralité du poids de l’impôt : une telle taxe faisait fuir le capital à l’étranger et, les emplois, comme les salaires en France, diminuaient.
Par ailleurs, quelques secteurs sont délicats : agriculture, pêche, et transports (taxis, TRM,
ambulanciers...), sachant que les consommations de « process » (non combustion) ne devraient pas rentrer dans l’assiette. Les secteurs précités ont manifesté leur hostilité. Cependant, ceux-ci pourront bénéficier des allègements de taxe professionnelle. » (p 63)
« La circonstance malheureuse qui veut que, par une coïncidence, l’État se trouve engagé au
même moment dans une autre opération salubre et très attendue, la suppression d’une grande partie de la taxe professionnelle ne doit pas laisser penser que la contribution climat-énergie puisse être à cet égard une recette compensatoire. En effet, l’acceptabilité de la CCE est très strictement liée au fait que les lourds sacrifices qu’on lui consent ont pour exclusif objet de nous prémunir contre le changement climatique par la modification profonde de nos comportements sociaux, notamment en matière de consommation énergétique. Il faut aussi que les Français soient convaincus que l’utilisation de la recette sera la plus favorable à l’emploi dans notre industrie. Tout viol de ces deux règles mettrait en danger le consensus national nécessaire. » (p 68)