Un débat régional aux implications nationales
- Direction Concorde ?
Le débat reste pour l’instant limité aux départements et aux milieux directement concernés, mais, à l’image du débat sur le mariage gay, il pourrait venir sur le devant de l’actualité française. D’autant qu’il est la clef d’un des engagements de campagne de François Hollande : inscrire la loi de 1905 de séparation des églises et de l’État dans la constitution.
Bien que François Hollande ait assuré qu’il ne toucherait pas au Concordat, les experts en droit constitutionnel affirment qu’il est incompatible avec le projet présidentiel et qu’il devra être sacrifié.
En Alsace-Moselle, où le Concordat est bien ancré, les parties prenantes sont conscientes de sa précarité et s’en inquiètent.
Les autorités religieuses, catholiques, protestants et juifs, y sont plus qu’attachées, elles le défendent pied à pied. Non sans contradictions. Rares en effet sont les chrétiens à vouloir « rendre à César ce qui est à César » comme l’enseignait Jésus. Et si le Concordat a tant de vertus, pourquoi les églises ne revendiquent-elles pas son extension au reste de la France ? Si les religions arrivent à vivre ailleurs sans ce financement de l’État, pourquoi ne le pourraient-elles pas en Alsace Moselle ? A cela elles répondent à l’unisson des politiques, y compris de gauche, que ce n’est pas qu’une affaire de financement. Que le Concordat permet une qualité de dialogue sans égale, non seulement entre les religions et les pouvoirs publics, mais aussi entre les différentes religions (l’islam en est pourtant exclu !). Et qu’il ne va pas à l’encontre de la laïcité, mais constitue une autre forme de laïcité.
Une laïcité à redéfinir
L’argument n’est pas infondé. Pourquoi en effet ne financerait-on pas les religions ? La plupart des pays financent bien les sports ! Pourquoi être attentif à la santé physique des citoyens et pas à leur équilibre spirituel ? Sur quels fondements l’État s’arroge-t-il le droit de juger de ce qui est bon ou mauvais pour les citoyens ?
La Belgique considère que cela vaut la peine de soutenir les religions. Mais non sans un certain malaise, car, tout en poussant assez loin le principe de neutralité - jusqu’à financer des organisations laïques - le système a du mal à évoluer pour coller aux évolutions de la société.
La France s’y refuse par principe, mais le fait quand même (par exemple en accordant une réduction d’impôt d’un montant égal à 2/3 des dons aux organisations religieuses).
Le débat sur le Concordat pose en fait deux questions fondamentales :
Qu’est-ce que la République peut ou doit financer ? Quelles sont les frontières de l’intervention publique ?
Si on choisit de subventionner, comment le fait-on et sur quels critères ? Peut-on par exemple exclure des groupes minoritaires sous prétexte de risques de dérives sectaires ?
Sur le papier, les positions de la France et de la Belgique sont diamétralement opposées, mais sont-elles si éloignées que cela dans les faits ? Le temps n’est-il pas venu d’un peu plus de clarté et de courage, de faire enfin ce que l’on dit et de le faire vraiment ou de dire ce que l’on fait ?
On peut marcher avec une épine dans le pied, mais si on ne fait rien, il arrive un moment où on ne peut plus avancer !
Pour débattre : Faut-il maintenir le Concordat ?
Crédit photo : Olivier Bruchez