Accueil > Faut-il dépénaliser le cannabis ? > L’Inserm fait le point sur les conduites addictives chez les (...)
L’Inserm fait le point sur les conduites addictives chez les adolescents
vendredi 7 février 2014
L’Inserm publie le 6 février une « expertise collective » sur les conduites addictives chez les adolescents, rédigée par un groupe d’experts en épidémiologie, santé publique, sciences humaines et sociales, addictologie, neurosciences et communication.
Il s’agissait pour l’Institut national de faire un bilan des connaissances scientifiques sur les vulnérabilités des adolescents (âgés de 10 à 18 ans) à l’usage de l’alcool, du tabac et du cannabis, mais aussi aux pratiques identifiées comme pouvant devenir problématiques (jeux vidéo/Internet, jeux de hasard et d’argent). L’Inserm a également analysé les stratégies de prévention et d’intervention efficaces pour cette tranche d’âge.
Vulnérabilité des adolescents
Le cerveau de l’adolescent est plus vulnérable aux substances psychoactives que le cerveau de l’adulte. Il présente la particularité d’être dans un état de transition vers l’état adulte. Les processus de maturation cérébrale (qui se poursuivent jusqu’à environ 25 ans) entraînent une vulnérabilité exacerbée de l’adolescent vis-à-vis de la neurotoxicité des substances psychoactives en général. Une zone du cerveau, le cortex préfrontal, qui permet la prise de décision, l’adaptation du comportement à la situation, est plus particulièrement concernée par cette maturation à l’adolescence.
Quel que soit le produit considéré, la précocité de l’expérimentation et de l’entrée dans la consommation accroît les risques de dépendance ultérieure et plus généralement de dommages subséquents.
Dommages et vulnérabilité des adolescents liés au cannabis
En France, le cannabis est le premier produit psychoactif illicite consommé à l’adolescence. En 2011, 42 % des adolescents de 17 ans ont déjà fumé du cannabis au moins une fois (39 % des filles et 44 % des garçons).
Dans les heures qui suivent l’usage de cannabis, les troubles cognitifs observés concernent l’attention, le temps de réaction, la mémoire de travail, et les fonctions exécutives. Il existe par ailleurs une corrélation significative entre l’usage et divers « passages à l’acte » (tentatives de suicide, boulimie, comportements sexuels à risque…) dus à la levée de l’inhibition comportementale.
Ces troubles cognitifs ont tendance à disparaître dans le mois suivant l’arrêt de la consommation. Chez l’adolescent, certains de ces troubles peuvent persister, y compris après sevrage, en particulier si la consommation a débuté avant l’âge de 15 ans. Les troubles cognitifs observés à long terme sont corrélés à la dose, la fréquence, la durée d’exposition et à l’âge de la première consommation de cannabis.
La consommation régulière de cannabis a des effets à long terme qui peuvent altérer les résultats scolaires, et les relations interpersonnelles.
Enfin, l’usage de cannabis peut également précipiter la survenue de troubles psychiatriques (troubles anxieux, troubles dépressifs, symptômes psychotiques et schizophrénie) chez l’adolescent. Concernant les troubles psychotiques, ce risque peut être modulé par certains facteurs génétiques, l’âge d’exposition et l’existence préalable d’une vulnérabilité à la psychose (antécédents familiaux).
Stratégies de prévention efficaces
Les experts soulignent que les actions à développer doivent cibler en priorité l’alcool et le tabac, voire le cannabis, en raison des niveaux d’usage et des dommages associés qui prédominent sur les autres substances et les jeux.
Plusieurs stratégies d’interventions ont montré des effets bénéfiques sur la prévention ou la diminution de la consommation de substances psychoactives. En particulier, trois types d’intervention sont le plus souvent présents dans les programmes validés comme efficaces :
le développement des compétences psychosociales des jeunes (gestion des émotions, prise de décisions, estime de soi)
celles de leurs parents (amélioration de la communication, gestion des conflits)
les stratégies à composantes multiples (intégrant au niveau local d’autres acteurs que l’école et les parents en plus du développement des compétences des jeunes et des parents).
Le rapport souligne enfin que les adolescents demeurent très sensibles aux messages véhiculés par les parents. C’est pourquoi le groupe d’experts recommande d’informer régulièrement les parents sur les dommages liés aux consommations précoces, sur l’évolution des modes de consommation chez les jeunes et sur les codes marketing qui leur sont destinés et qui visent à promouvoir la consommation. Il s’agit d’aider les parents à avoir l’attitude la mieux adaptée à la situation.